LA JEUNESSE, TEMPS DE BENEDICTION DIEU ET DE MATURATION PERSONNELLE

Par Christián Kasema CMF

Introduction

La jeunesse ! Voilà une étape décisive, déterminante et bien indiquée pour approfondir l’intimité avec Dieu et devenir utile à soi-même et aux autres. Mais que faire pour y parvenir ? Comment cimenter et meubler utilement, intelligemment, sagement et incontestablement ce temps ? Ce modeste partage, nourrie par une expérience et des convictions très personnelles, n’a aucune prétention de suggérer des choses extraordinaires. Il se veut tout simplement une exhortation à l’endroit de notre jeunesse qui a besoin des propositions concrètes pour se réaliser.

En effet, partant des faits vécus et observés, des comportements affichés et rencontrés, des documents de l’Eglise et autres exploités, des témoignages attestés par d’autres adultes modèles, je voudrai, à travers ces quelques lignes, attirer l’attention de notre jeunesse à la vigilance, elle qui, aujourd’hui, grandit dans un contexte des antivaleurs marqué par la superficialité et la duplicité. Pour ce faire, ce partage sera subdivisé en deux points essentiels : La Jeunesse est un temps de bénédiction Dieu et un temps de maturation personnelle.

   La Jeunesse, temps par excellence de bénédiction Dieu

  • Jeunesse de Jésus dans l’Evangile de Luc 2, 48-52

         Quelques paroles de l’évangéliste Luc permettent de se convaincre que le jeune Jésus de Nazareth est et demeure, sans aucun doute le modèle par excellence d’une étape de jeunesse réussie : Dans un des articles très intéressant intitulé Que sait-on de la jeunesse de Jésus ? José LONCKE (Membre de rédaction de la revue Croire et Vivre) fait une très belle lecture de l’enfance, du métier, de la vie quotidienne et de la formation du jeune Jésus à Nazareth. En effet, à son époque, les gens évoluaient généralement entre leur village et les champs. Les artisans fabriquaient et vendaient leur production sur la place du marché. Le forgeron et le charpentier étaient généralement côte à côte ou face-à-face dans une rue bordée de boutiques. Et, on sait que Joseph, son père adoptif, était charpentier-menuisier. C’est donc dans un atelier de charpentier que Jésus devait apprendre le métier qu’on se transmettait de père en fils. On l’a d’ailleurs surnommé le « charpentier ». Toujours au sujet de la vie quotidienne de Jésus, Loncke découvre qu’à l’époque de Jésus, l’école était installée dans la synagogue du village. À cinq ans, on commençait à y lire la Torah ; dès dix ans, on étudiait la tradition et les commentaires des sages. Comme on le remarquera, ceux-ci lui ont souvent inspiré les illustrations de ses discours.

         Les évangiles nous relatent un seul incident de cette période ; étonné de l’inquiétude de ses parents, il leur a demandé : « Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père ? » (Luc 2, 48-52) Manifestement, Jésus avait commencé à prendre conscience de son identité de fils de Dieu. Et, comme le précise l’Evangile, il leur était soumis et on voit bien qu’il s’était déjà démarqué dès son jeune âge des autres jeunes de son groupe (c’est ici l’attitude à imiter en tant que jeune située à la croisée de chemins innombrables). L’on peut comprendre que ces années ont forgé son caractère et l’ont préparé à aller jusqu’au bout de sa mission : offrir sa vie pour l’humanité et devenir ainsi le Sauveur du monde. C’est pourquoi, depuis plusieurs décennies, le Magistère de l’Eglise s’emploie à encourager et à former les personnes appartenant à cette fourchette d’âge, afin que comme le jeune Jésus de Nazareth, à travers leur vie, ils servent dignement l’Eglise et la société.

  • Jeunesse, temps béni d’après le Pape François Christus Vivit

En effet, plus d’un Papes avant le Pape François, non seulement ont obéi à la tradition des JMJ (Journées mondiales des Jeunes), mais ont aussi écrit des traités dans le souci d’éduquer et de former les jeunes. C’est par exemple l’importance de la rédaction de Christus Vivit par le Pape François. Dans ce document dense de contenu et large de visées, le Pape affirme que « Être jeune est une grâce, une chance » (Christus Vivit, n° 71). La jeunesse est un temps béni pour le jeune, et une bénédiction pour l’Église et pour le monde. Elle est une joie, un chant d’espérance et une béatitude, un temps de rêves et de choix (Christus Vivit, n° 135). La jeunesse, poursuit le Pape, est une phase du développement de la personnalité ; elle est marquée par des rêves qui, peu à peu, prennent corps, par des relations qui acquièrent toujours plus de consistance et d’équilibre, par des tentatives et des expériences, par des choix qui construisent progressivement un projet de vie. À cette période de la vie, les jeunes sont appelés à se projeter en avant, sans couper leurs racines, à construire leur autonomie, mais pas dans la solitude (Christus Vivit, n° 137). Le Pape François déclare au n° 138 de Christus Vivit que l’amour de Dieu et notre relation avec le Christ vivant ne nous empêchent pas de rêver, et n’exigent pas de nous que nous rétrécissions nos horizons. Au contraire, cet amour nous pousse en avant, nous stimule, nous élance vers une vie meilleure et plus belle. Ceci exige du jeune des choix décisifs et salutaires à opérer, des options à prendre et orientations à suivre. 

Lorsque je vivais encore mes premiers pas de vie clarétaine, juste quelques mois après ma première profession religieuse, un de mes formateurs m’avait dit : « Christian, je suis profondément convaincu que l’on ne devient jamais brusquement bon religieux ou mauvais religieux ; l’orientation que tu donnes à ta vie maintenant, déterminera tout le reste de ton existence dans la vie religieuse ». Et peu avant lui, un autre formateur ne cessait nous le répéter « Mes amis, chacun de vous deviendra le religieux qu’il voudra être ».  Ces deux déclarations au milieu de tant d’autres, ont constitué jusqu’à ce jour (17 ans de vie religieuse) le leitmotiv de mon cheminement vocationnel à la suite du Christ selon le style de Saint Antoine Marie-Claret.

  • À l’exemple du Père Claret

Le Père Claret nous partage une attitude interpellatrice dans son Autobiographie. En effet, bien qu’il soit préservé pour une mission particulière dans l’Eglise et dans le monde, ce qu’il nous dit est une expérience édifiante. Il écrit : « En ma présence, personne n’osait prononcer des mauvaises paroles ni tenir des conversations scabreuses. En une certaine occasion, je me trouvais par hasard dans une réunion de jeunes, – ce que j’évitais d’habitude, parce que je savais le langage qu’on y tenait ; et l’un des plus grands me dit : ‘‘Antoine, vas t’en, parce que nous allons parler de choses mauvaises’’. Je l’ai remercié de m’avertir et jamais plus je ne suis allé avec eux » (Aut., n° 53). Le jeune qui voudrait devenir un vrai ami du Christ, utile à lui-même et aux autres, doit se garder à écouter, à prononcer des mauvaises paroles et à se fusionner aux expériences pessimistes, exhibitionnistes et déviatrices. For malheureusement, ce sont les antivaleurs qui gangrènent notre monde en pleines mutations et attirent violemment les jeunes aujourd’hui. Plusieurs jeunes n’ont pas le sens de discernement et n’ont pas des bons modèles à imiter.  

  1. La Jeunesse, temps de maturation personnelle
    • La Jeunesse, temps de maturation personnelle

         Il est vrai que l’une des caractéristiques de l’équilibre est d’être précaire. Cependant, en toute circonstance, ma modeste expérience me rappelle qu’il faut demeurer à la quête de l’équilibre. L’expérience est certes différente, tout comme les hommes sont différents les uns les autres. Par conséquent, m’efforcer à affronter ma solitude, à être conscient de ma mission spécifique au milieu des hommes et femmes est, jusqu’à ce jours, une attitude qui m’aide toujours à persévérer et à ne pas tomber dans la fatalité. S’adressant aux jeunes de son archidiocèse de Kinshasa, le Cardinal Malula, d’heureuse mémoire disait ceci à propos de la conscience humaine : « L’être humain se différencie des autres êtres qui sont dans le monde par sa liberté et sa conscience. C’est pourquoi le vrai progrès et la vraie grandeur de l’homme se mesurent non pas avant tout par son avoir, mais par son être plus libre et par son être plus consciencieux. Appliquez-vous donc à maîtriser vos passions. Car la maîtrise de ses passions libère les énergies intellectuelles et les facultés spirituelles de l’homme. La pureté, l’amour de la vérité, la conscience de son devoir élève l’homme et l’ennoblissent. Libérer les tiraillements et de la servitude des passions, l’homme acquiert un sens aigu du devoir et de ses responsabilités. Il devient capable de se prononcer, de se donner à son devoir, de préférer, s’il le faut, l’utile à l’agréable. La conscience de votre devoir vous donnera l’amour du travail fini, du travail bien fait »[1]. Je voudrai seulement dire à notre jeunesse exposée par plusieurs fléaux sociaux que ces conseils m’ont beaucoup soutenu. Ceci étant, le déploiement radical de ses potentialités pendant la jeunesse revêt d’une importance capitale.

  • La Jeunesse, étape du déploiement radical de ses potentialités

         Pour déployer mes propres potentialités, ma petite expérience (surtout durant ma formation initiale et permanente) m’a montré que le contexte dans lequel on évolue est déterminant. En cela, « être moi-même » tout en vivant avec les autres s’avère nécessaire. Si non, il y a risque de confondre le statut et le travail à faire. Il y a risque d’oublier le merveilleux principe de sélection. Il est question d’affirmer et de confirmer, d’éprouver et de prouver sa foi et sa raison. Que l’on prie, que l’on travaille, que l’on mange ou quoique l’on fasse, on devrait se comporter en responsable tout en faisant attention aux imitations aveugles et à l’injonction à la visibilité nous imposée par les nouvelles technologies d’information et de communication (NTIC). C’est très moins prudent si l’on s’engage à faire comme tout le monde. La réponse à l’appel de Dieu à être jeune est personnelle, aussi le salut est personnel bien que s’annonçant et s’exprimant au sein d’une communauté de vie, au sein d’un environnement donné. Gare « aux attitudes suivistes » et aux « tendances imitatrices aveugles ». J’attire donc l’attention du jeune qui me lit à éviter d’être un « épigone » aveugle.   

  • Engagement dans les activités

         Pour cultiver l’unité personnelle dans les aspects humain, chrétien, religieux et missionnaire, il m’a fallu m’appesantir sur la conviction selon laquelle, je dois devenir serviteur pour et avec les autres en partageant, en toute simplicité, la vie des autres chrétiens au quotidien. Cette engagement à travers les différents services que je devrai rendre m’a beaucoup aidé. J’y ai appris bien des choses et acquis l’expérience.

Conclusion

              Ce modeste partage n’a eu pour finalité que d’inviter notre jeunesse clarétaine et mondiale à convertir son regard en face des mutations multiformes du monde actuel. Le jeune qui se veut responsable et qui aspire à une vie utile à lui-même et aux autres, devrait apprendre, non seulement à détecter sa vocation spécifique au milieu d’une diversité des vocations, à risquer, à s’engager et à servir tout en construisant sa personnalité sur des bases solides et conséquentes. Le modèle du jeune Jésus de Nazareth, les exhortations du Magistère de l’Eglise, la vie du Père Claret ainsi que le discernement peuvent l’aider à mieux vivre la riche étape de la jeunesse, temps béni de Dieu et de maturation personnelle en s’appuyant bien évidement sur la grâce du Seigneur. 

 

Roma, Italia.

June 25, 2022.

[1] Cardinal Joseph Albert MALULA, À la jeunesse de Kinshasa, Kinshasa, éd. Saint Paul Afrique, 1985, p.12.

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